Le label ISR français accuse certaines critiques depuis quelques mois car il reste contraignant pour les entreprises et ne respecte pas la volonté intrinsèque des investisseurs en matière d’éthique.
Est-il en train de vivre ses derniers instants sous sa forme actuelle?
Définition:
En juillet 2013, l’AFG (Association Française de la Gestion financière) et le FIR (Forum pour l’Investissement Responsable) définissent l’ISR :
Placement qui vise à concilier performance économique et impact social et environnemental, en finançant les entreprises et entités publiques qui contribuent au développement durable quel que soit le secteur d’activité, en influençant la gouvernance et le comportement des acteurs, l’ISR favorise une économie responsable.
L’ISR a été annoncé par Michel Sapin le 28 septembre 2015 et publié par décret le 8 janvier 2016.
Les organismes certificateurs sont l’Afnor Certification et EY France.
Quelques chiffres :
En 2019, environ 20% de la collecte UC était dirigé vers l’ISR
C’est aujourd’hui 503 fonds labellisés pour 201 milliards d’encours sous gestion gérés par 78 organismes.
6 français sur 10 accordent leurs importances aux sujets environnementaux dans leurs décisions de placements, (AFG 2018).
La loi pacte impose aux sociétés de gestion à proposer au moins 1 fonds par contrat d’assurance-vie.
De 2017 à 2020, les encours ont augmenté de 25% sur la partie ISR.
Performance des fonds ISR
En 2015, une étude de l’université d’Oxford basée sur + 200 sources et études démontrait que dans 80% des cas la durabilité à une influence positive sur les performances.
Sonia Fasolo, gérante ISR à La Financière de l’Échiquier, vient d’explorer la question dans un travail de fond. « ISR et performance ne sont pas incompatibles, bien au contraire, confirme-t-elle. Le portefeuille des meilleurs profils ESG génère sur neuf ans une performance 2,3 fois supérieure à celui des pires profils ESG.
Il semble donc possible de dire qu’allier performance et éthique est aujourd’hui une réalité.
Les différentes approches ISR
L’approche ESG :
L’ESG (Environnement, social et gouvernance), pour plus d’informations, « la finance verte« .
En 1971, 2 prêtres méthodistes ont lancé le 1er fonds ISR sur la méthode « Best in class ».
Il ne s’agit pas d’exclure certains secteurs d’activités mais de sélectionner les meilleurs élèves en matière d’ESG dans chaque catégorie dans le but d’améliorer les comportements de chacun.
Aujourd’hui cette méthode représente en France 84% du marché, tous les secteurs sont représentés y compris le nucléaire, le pétrole, l’automobile, l’armement…
La méthode « best in universe » est une autre variante de l’approche ESG, elle consiste à selectionner les meilleures entreprises sur le plan ESG toutes catégories confondues, en assumant le biais sectoriel.
Elle représente 11% du marché.
La sélection thématique :
Elle consiste à ne sélectionner que des entreprises orientées vers l’économie verte, à savoir :
- Développement durable
- Energie renouvelable
- Environnement
- Eau
- Santé
- Climat
Cette méthode représente 4% du marché, bien trop faible à comparer aux enjeux écologiques.
L’exclusion :
L’idée est de sectionner toutes les entreprises sauf dans certains secteurs d’activités, à savoir :
- Alcool
- Tabac
- Armement
- OGM
- Nucléaire
- Pornographie
- Non respect des traités et des conventions
La gouvernance
Dernière façon d’identifier un fonds ISR, cette technique est plus utilisée sur le marché américain.
Elle récompense l’engagement actionnarial ou activisme actionnarial qui valorise la responsabilité sociale de l’entreprise.
Cette approche mesure l’impact des investisseurs dans les prises de décision sociales et éco-responsables de l’entreprise dans laquelle ils ont investi. Cela passe généralement par un droit de vote lors d’assemblées générales.
Le Greenwashing
Le greenwashing (éco-blanchiment) est une méthode de marketing consistant à communiquer auprès du public en utilisant l’argument écologique. Le but du greenwashing étant de se donner une image éco-responsable, assez éloignée de la réalité… La pratique du greenwashing est trompeuse et peut-être assimilée à de la publicité mensongère
Derrière l’ISR se dissimule parfois des airs de « greenwashing ».
En effet c’est à ce jour le seul label européen qui n’oblige pas l’exclusion de certains secteurs d’activités incompatibles avec l’économie verte.
C’est bien le problème de la méthode « best in class » qui permet au gestionnaire de sélectionner des entreprises dans tous les secteurs d’activités.
C’est pour cette raison que vous pouvez investir dans un fonds ISR et vous retrouver avec une pétrolière en portefeuille.
Pour preuve, observons un fonds du géant britannique, Aviva Grandes Marques ISR :
Sur le dernier rapport de gestion, juillet 2020, voici les premières lignes du portefeuille :
- Amazon 4,41%
- Microsoft 4,20%
- Apple 3,85%
- Paypal 3,76%
- Salesforce 3,33%
Quand une personne souhaite investir éthique, responsable ou solidaire, je ne pense qu’il s’attend à avoir ces entreprises en portefeuille.
L’ISR ne vous garantit absolument pas d’investir dans l’économie verte.
Comment retrouver un fonds ISR
Les agences de notations, comme Quantalys ou morningstar…
Par contre, elles ont leurs propres critères en matière d’ISR.
Chez Quantalys, est considéré comme ISR, une société de gestion qui utilise une analyse « extra-financière » en matière d’ESG, dans son processus d’investissement, soit en ayant recours à une société spécialisée, soit en ayant une équipe interne dédiée à cette démarche (conflit d’intérêt).
Quantalys repertorie ainsi + 1000 fonds ISR, alors que la référence dans le domaine Novethic en repertorie 530.
Les sociétés de gestion ne sont pas contraintes de labelliser leurs fonds pour se déclarer vertueuses en terme d’ESG.
Le site officiel du label ISR, référence tous les fonds labellisés.
Ce sont donc les véritables fonds ISR qui ont obtenu le label par le gouvernement français.
Son nom, les fonds ISR sont souvent estampillés de ce dernier.
Conclusions :
Tous les fonds ISR ne sont pas ISR, et tous les fonds ISR ne vous garantissent pas d’investir dans des entreprises dirigées vers l’économie verte.
Privilégiez les fonds labellisés ISR en premier lieu, ceux qui se retrouvent sur le site officiel du gouvernement.
Excluez tous les fonds avec une approche ESG de type « Best in class » qui sont une abérration.
C’est un peu comme dans le bio dans les grandes surfaces qui emballent leurs produits bio dans des emballages plastiques, qui sont des perturbateurs endocriniens et qui in fine polluent la planète… du coup l’approche « green » et « healty » n’a plus lieu d’être.
Privilégiez l’approche thématique et dirigez vous vers des labels du type Greenfin, Luxflag et Nordic Swan beaucoup plus contraignants et plus respectueux de la charte verte.
Attention aux frais, ces fonds sous couvert de l’éthique peuvent être de vrais gloutons de performance.
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